L’investissement durable, souvent appelé investissement ESG, désigne généralement les approches intégrant les facteurs ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) dans le processus de gestion des placements. L’intérêt envers ces approches a explosé ces dernières années. Selon Google Trends, l’intérêt mondial envers l’investissement durable a atteint son niveau le plus élevé sur la plus longue période observable.
Source : Google Trends, janvier 2004 à juin 2021. Les chiffres représentent l’intérêt par recherche par rapport au point le plus élevé du graphique pour une région et un temps donné. Une valeur de 100 représente le sommet de popularité de la période. Une valeur de 50 signifie que la période est moins populaire de moitié. Une valeur de 0 signifie qu’il n’y avait pas suffisamment de données sur la période.
Les changements climatiques sont considérés comme étant le facteur initial ayant motivé l’intérêt envers l’investissement durable. Cependant, la pandémie de COVID-19 au début de 2020 a fortement accéléré cette tendance alors qu’un intérêt accru porté aux questions sociales s’est répandu. Tout d’abord, la chasse à l’équipement de protection individuelle a attiré l’attention sur l’importance de l’accès à cet équipement lorsque les pays disposant de capacité de fabrication ont bloqué l’exportation de ces articles essentiels pour s’assurer que leurs propres citoyens soient protégés en premier. Les économies étant paralysées afin d’éviter la propagation du virus, les travailleurs des secteurs de l’hôtellerie et du tourisme, moins bien payés, ont été affectés de manière disproportionnée par les pertes d’emploi, alors que de nombreux professionnels ont simplement adopté le télétravail. Les travailleurs essentiels des établissements de soins collectifs, des produits alimentaires et des centres de distribution ont été excessivement exposés à des problèmes de sécurité au travail en raison d’éclosion du virus sur leur lieu de travail. Actuellement, les pays les plus riches accumulent les stocks de doses de vaccins pour leur propre population, limitant encore ici l’accès mondial à des soins de santé.
Dans un autre ordre d’idée, les sociétés ouvertes subissent une pression accrue de leurs actionnaires et des tribunaux pour agir avec plus de détermination sur la question des facteurs de durabilité. Le mois de mai 2021 en a fourni un exemple parfait lorsque trois entreprises du secteur de l’énergie se sont retrouvées au centre d’évènements très médiatisés liés à la lutte contre les changements climatiques. Tout d’abord, aux Pays-Bas, un tribunal a ordonné à l’entreprise Royal Dutch Shell de réduire ses émissions de CO2 (incluant celles de ses fournisseurs et clients) d’un pourcentage net de 40 % d’ici 2030 par rapport à ses niveaux de 2019. L’entreprise avait annoncé plus tôt son objectif de réduire l’intensité en carbone de ses produits énergétiques de 20 % d’ici 2030. Ensuite, le deuxième évènement a été un vote des actionnaires d’ExxonMobil, où un investisseur activiste a gagné trois sièges au conseil d’administration sur les 12 membres du conseil de l’entreprise. Ces trois administrateurs ont été nommés pour aider Exxon à créer de la valeur à plus long terme en instaurant des répartitions du capital plus disciplinées et une politique d’incitation correspondant davantage aux valeurs des actionnaires, ainsi qu’à opérer une transition pour conserver sa capacité concurrentielle dans une économie plus faible en carbone. Le dernier évènement est survenu à Chevron, où les actionnaires ont voté en faveur d’une réduction des émissions de portée 3 de l’entreprise1, un vote allant à l’encontre des recommandations de la direction.
Nous pouvons observer l’intérêt accru envers l’investissement durable au moyen des flux de fonds vers les fonds d’investissement durable établis au Canada (fonds communs, FNB et fonds distincts). Les flux de fonds en 2020 ont plus que triplé par rapport à ceux déclarés au cours des cinq années précédentes combinées, et la tendance parabolique s’est maintenue au cours des cinq premiers mois de 2021 seulement : les flux de fonds ont plus que doublé par rapport à ceux déclarés pour la totalité de 2020.
Source : Morningstar Research Inc., le 31 mai 2021 – exclut les fonds de fonds
Malgré la croissance des flux de fonds, il semble que ces tendances pourraient être beaucoup plus fortes en raison d’un écart important entre l’intérêt et l’utilisation de l’investissement durable. Un rapport de recherche de 2020 du CFA Institute2 a révélé que, parmi les investisseurs mondiaux, l’intérêt envers les solutions durables dépasse de loin l’utilisation au sein de tous les groupes d’âge. Les écarts dans l’utilisation (% d’intérêt moins % d’utilisation) se situent constamment dans une fourchette de 53 % à 63 %, représentant ainsi pour les solutions d’investissement durable un immense potentiel encore inexploité.
Une dynamique très similaire s’applique également aux investisseurs canadiens. Selon l’Association pour l’investissement responsable (AIR), 73 % des investisseurs interrogés ont manifesté un intérêt envers l’investissement durable, alors que seuls 33 % d’entre eux avaient recours à des stratégies d’investissement durable. Parmi les investisseurs plus jeunes (de 18 à 34 ans), 83 % ont démontré un intérêt envers le sujet alors que seuls 50 % d’entre eux utilisent une stratégie d’investissement durable, tandis que pour la tranche d’âge des 55 ans ou plus, les résultats étaient respectivement de 59 % et de 20 %.
Comme relevé plus tôt, les jeunes investisseurs sont particulièrement intéressés par l’investissement durable. Ce n’est pas surprenant puisque les populations plus jeunes seront probablement les plus affectées par les effets des changements climatiques sur leur qualité de vie. Ils sont plus disposés à agir maintenant pour éviter la « tragédie de l’horizon », un terme inventé par Mark Carney, ancien gouverneur de la Banque du Canada (et de la Banque d’Angleterre). Ce terme fait référence au fait que les effets dévastateurs des changements climatiques se feront sentir au-delà de l’horizon dont la
plupart des dirigeants mondiaux prennent en compte dans leurs décisions politiques. Cependant, lorsque ces effets seront suffisamment imminents pour être considérés comme une menace dans le cadre de leurs politiques, il sera probablement trop tard.
Si l’on combine les opinions de cette jeune population au transfert continu de richesse entre générations, la demande pour des produits d’investissement durable pourrait exploser davantage. Selon Investor Economics3, les baby-boomers devraient transférer aux jeunes générations un patrimoine évalué à environ 1 000 milliards de dollars d’ici 2026 au Canada.
L’investissement durable d’aujourd’hui ne consiste plus simplement à éviter les entreprises considérées comme étant impliquées dans des secteurs « non éthiques »: c’est du passé. Il s’agit désormais de réaliser que les facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance peuvent avoir une incidence réelle sur la valeur d’un placement et sur les portefeuilles. Il s’agit également de diriger les capitaux vers des entreprises et des occasions pouvant engendrer des changements positifs pour tous. Ce changement de mentalité tient compte des bénéfices, des gens et de la planète. Les perspectives d’affaires des conseillers et des institutions financières qui ne s’adaptent pas à cette évolution des données démographiques et des priorités des investisseurs pourraient être affectées de manière considérable.
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L’investissement durable à l’Empire Vie
1 Les émissions de portée 3 sont des émissions indirectes provenant de sources non détenues par l’entreprise, par exemple lorsque les consommateurs de l’entreprise utilisent de l’essence.
2 Future of Sustainability In Investment Management: From Ideas to Reality, 2020 (version anglaise seulement)
3 Rapport sur le bilan des ménages 2019 d’Investor Economics
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Juillet 2021